Le secret des transferts immobiliers
et le caractère occulte des hypothèques sont la règle sous
l'ancien régime. La propriété se transmet par simple
consentement. Cette situation générait une insécurité
importante qui n'était acceptée qu'en raison d'une certaine
stabilité de la fortune foncière. Seules quelques provinces
connaissaient une certaine forme de publicité : Dans les
provinces du Nord et de l'Est on pratiquait le régime
du nantissement. Il était de coutume qu'un créancier ne
pouvait acquérir d'hypothèque sur les biens du débiteur, que
par le nantissement, c'est-à-dire, I'inscription de la créance
sur un registre public tenu par le greffier. En Bretagne existait
le régime de l'appropriance qui s'appliquait au transfert
de propriété mais pas à l'hypothèque. Tout transfert de propriété
devait faire l'objet de trois proclamations successives (3
bannies), trois dimanches de suite à l'issue de la grand'messe.
Les contestataires avaient 8 jours après la dernière publication
pour se faire connaître, s'ils étaient présents, et un an,
s'ils étaient absents. Le tribunal prononçait l'adjudication du
bien à l'acquéreur.
Dans le reste du royaume, c'était le régime de
l'insinuation : I'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539
rendait obligatoire pour les libéralités -essentiellement les
donations entre vifs- I'insinuation, c'est-à-dire la reproduction
des actes sur un registre public. Cette insinuation donnait
authenticité à l'acte de transfert de propriété, mais
n'impliquait pas l'idée de publicité visant à révéler les
charges ou hypothèques qui pesaient sur les immeubles.
L'édit du 21 mars 1673, dit
"de Colbert", institue la législation sur les hypothèques,
applicable dans l'ensemble du royaume. Destiné à protéger les
créanciers par la publicité effective des hypothèques, I'édit
souleva une vive opposition conjuguée de la noblesse préférant
le secret à la sécurité afin de ne pas révéler au grand jour
son endettement hypothécaire, et du notariat craignant une mise
en cause de ses prérogatives. Le conservateur de l'époque, qui
s'appelait "greffier", devait tenir un registre qui
rappelle étrangement le registre de dépôt actuel. Des sanctions
étaient prévues contre le greffier coupable d'avoir laissé un
blanc entre les enregistrements; I'arrêté du registre devait être
signé du greffier et du juge.
L'édit a été révoqué en 1674.
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